samedi 3 octobre 2009

L' Affaire

J'étais pourtant bien décidée à ne pas me prononcer ici sur l'affaire qui défraye la chronique, qui personnellement ne me passionne pas particulièrement, et javoue même que je suis un peu choquée de voir tant de gens se répandre sur le net, se focaliser là dessus et ignorer, entre autres horreurs actuelles, la tragédie des Samoa et de l'Indonésie. J' étais donc résolue à garder un silence éloquent, mais après avoir retourné mes doigts sept fois sur mon clavier, j'ai quand même envie de consigner quelques reflexions ici.


Il y a une humaniste en moi qui croit que les hommes peuvent évoluer, et que surtout toute personne peut à un moment donné, dans des circonstances particulières, commettre l'irréparable, un délit, une faute grave, un meurtre même. Je ne crois pas qu'il y ait des bons et des méchants, je crois en la faiblesse et en la force des hommes, et surtout je crois en une forme d'espoir sans laquelle toute vie en société est condamnée. C'est pourquoi je comprends la notion de prescription en justice.

Quelque soit le crime(si on met à part celui contre l'humanité, car il faut bien toujours une exception à la règle), il doit pouvoir être "oublié", on doit pouvoir tourner la page et aller de l'avant, et pas seulement quand le criminel "a été puni pour sa faute", "a fait son temps" ou autrement dit "a payé sa dette à la société", car il arrive que la justice soit imparfaite, que des accords soient conclus(parfois j'imagine à juste titre, d'autre fois moins sans doûte), que des procédures soient trop lentes, que des justiciables fuient. Le temps passe ensuite, les hommes refont leur vie, et même une meilleure vie que celle qu'ils auraient eue, et par meilleure j'entends meilleure pour eux et pour les autres.

Bien sûr il arrive que ceux qui s'en sont sortis si vite, retombent dans les mêmes schémas et se révèlent des criminels en série, incapables de résister à certaines pulsions destructrices. Il s'agit à mon avis d'une toute autre catégorie d'individus, des malades, dangereux pour la société, et dans un monde parfait ils seraient assez tôt identifiés et mis hors d'état de nuire(internement, soins, suivi). Notre monde hélas n'est pas parfait.

Il n'empêche que je crois en la prescription, ce qui j'imagine est une manière de croire à une forme non religieuse de rédemption pour ceux qui ont dérapé.

Ainsi, contrairement à tant de gens, je comprends la réaction des artistes et des intellectuels dans l'affaire Polanski, et celle de notre ministre de la culture Frédéric Mitterrand (même si je la considère très maladroite, mais à mon avis il n'a pas l'étoffe d'un ministre). Je la comprends et je ne la condamne pas. Ils sont touchés de voir un homme de plus de soixante dix ans, un homme qu'ils connaissent et apprécient (bien sûr s'il n'était pas l'un des leurs ils s'en ficheraient et se seraient bien gardés d'intervenir mais c'est notre lot à tous de nous sentir concernés davantage quand un membre de la "famille" est touché), un homme qui s'est reconstruit après de nombreux drames, qui a une vie de famille stable depuis 20 ans, être ainsi rattrappé pas le passé, par une affaire de plus de 32 ans, qui n'a pas cessé de le poursuivre mais qu'il croyait peut-être enfin terminée puisque la plaignante avait cessé ses poursuites depuis longtemps et avait même pardonné.
Ils sont choqués par le traquenard dont Polanski a été la victime en Suisse, un pays où il séjourne régulièrement, où il a une maison, et où avait passé trois mois quelques jours auparavant! Une Suisse qui jusque là ne semblait pas gênée de l'accueillir malgré l'existence d'un mandat international mais qui, malheureusement pour lui, est aujourd'hui en indélicatesse avec les Etats-Unis pour des questions bancaires...

Je trouve leur émoi compréhensible. Mais je comprends aussi que cette mobilisation affole les avocats de Polanski, qui font tout pour calmer le jeu, car ils savent bien qu'elle peut s'avérer contreproductive et même préjudicable à leur client. Il n'y a qu'à voir les réactions qu'elle suscite chez les gens! Cette levée de bouclier ne peut qu'entraîner le zèle de juges qui préparent éventuellement leur élection (quelque chose qui nous dépasse ici en France, mais nous avons aussi nos propres défauts en matière de justice)et connaissent l'indignation habituelle de leur clientèle électorale quand il s'agit des "Puissants". "Se faire" un acteur, ou une célébrité, il paraît que c'est bon pour une carrière judiciaire.

Personne n'est au dessus des lois, l'argent ne peut pas acheter la justice, l'art n'absout pas les crimes! Voilà ce qu'on entend, et ce n'est pas faux d'ailleurs, la justice doit être la même pour tous, mais je crois aussi qu'il faut éviter les simplications, les passions, et savoir preuve de détachement tout en restant humain.

Le problème n'est pas que Polanski doit être libéré par ce qu'il serait un génie du cinéma (c'est un argument stupide!), le problème est que les circonstances qui entourent son arrestation en 2009 sont assez doûteuses et odieuses.

Quant aux faits, je me garderais bien de prononcer des vérités sur la nature exacte du crime (viol ou pas), tant les versions des deux protagonistes divergent (dans ses mémoires publiées il y a quelques années, Polanski raconte précisément ce qui s'est passé selon lui, parle d'une jeune fille assez paumée et déjà sexuellement active, continue de nier tout viol etc) et nous savons que dans ces affaires là le mensonge est possible des deux côtés. Tout ce qu'on sait avec certitude est que Polanski a eu des relations sexuelles avec une adolescente de 13 ans (près de 14 en fait) en 1977 dans des circonstances qui rappellent bien la "promotion canapé" en vogue depuis toujours dans ce milieu là (et je parie que c'est toujours le cas), avec l'aide d'alcool et de drogues. C'est un délit, une faute grave, Polanski a été inculpé, a fait plus de quarante jours de prison, des experts médicaux ont considéré qu'il n'était pourtant ni un pervers ni un pédophile, il est sorti de prison, puis un "deal" a eu lieu avec un juge et la famille de la victime. Ensuite le juge aurait changé d'avis, et Polanski effrayé a fui. Il a par la suite trouvé encore un arrangement avec la jeune femme, lui versant de nouveau des dommages et interêts, et elle a fini par laissé tomber la plainte et a réclamé plusieurs fois que les media cessent de la harceler. Pour elle aussi il y avait prescription. Elle a droit elle aussi à l'oubli.

Quoiqu'il en soit je crois qu'il ne faut pas seulement juger les faits, mais aussi les gens, sinon la justice perd tout aspect humain et pourrait aussi bien être rendu par des machines.

Polanski a toujours refusé de remettre les pieds aux Etats-Unis pour éviter d'être arrêté mais il ne s'est jamais caché, il n'a jamais dissimulé cette histoire (d'ailleurs je suis assez surprise de voir que certains semblent seulement découvrir ce passé qui lui colle à la peau alors que c'était de notoriété publique), il n'a plus jamais été compromis dans une affaire de moeurs (pourtant avec un passé pareil, on ne l'aurait pas raté s'il y avait eu la moindre plainte, et les journalistes s'en seraient donné à coeur joie), et il vit avec Emmanuelle Seigner depuis 20 ans (elle était jeunette quand il l'a séduite mais majeure) dont il a eu deux enfants aujourd'hui adolescents. Personnellement je ne crois pas que ce soit un dangereux criminel. Je le vois comme un homme plutôt résilient mais qui était sûrement bien paumé après l'assassinat de Sharon Tate, à une époque de libération sexuelle, un homme immature qui comme beaucoup d'autre mâles (beaucoup plus qu'on ne voudrait l'admettre à mon avis) était attiré par les jeunes filles en fleurs, et qui de part sa profession se retrouvait en situation de plus facilement franchir la ligne rouge. Il avait d'ailleurs eu une courte liaison avec Nastassja Kinski quand elle jouait Tess et elle n'avait que 15 ans (Chaplin couchait avec ses jeunes actrices, dont certaines avaient 13-14 ans mais tenaient des rôle de femmes à l'écran...mais il avait tendance à les épouser ensuite, ce qui empêchait J. Edgard Hoover d'avoir sa tête). L'époque était bien différente de la nôtre, et les relations sexuelles avec les mineurs n'étaient pas du tout perçues de la même façon. Il semble donc assez injuste de juger avec les critères d'aujourdhui.
Et puis nous ne parlons pas d'un type qui faisait la sortie des écoles ou caressait les petites filles prépubères de son entourage!

Je n' excuse pas Polanski, il a commis une faute peut-être même un crime si la jeune fille a été forcée, et cette culpabilité connue de tous ne le lâchera jamais, mais je ne pense pas que le Polanski de 2009 est le même Polanski que l'enfant du ghetto de Cracovie, ou que celui dont la femme enceinte fut massacrée par la bande de Charlie Manson, et ce n'est bien entendu pas le même que celui qui profita de sa position pour avoir des relations sexuelles (consensuelles ou pas) avec une adolescente en 1977. Le seul point commun c'est que sa vie reste faite de rebondissements. Les forces du destin semblent vraiment à l'oeuvre.

La justice américaine a hésité à l'époque et il en profité pour fuir, estimant qu'il n'aurait pas eu un procès équitable car le juge avait un "hidden agenda". Peut-être est-ce vrai, peut-être pas...En tout cas maintenant pour beaucoup d'artistes et quelques autres, tout ça ressemble à de l'acharnement inutile (il n'y a plus de plaignante), et à la volonté d'une Amérique procédurière (et d'un nouveau juge ambitieux) de punir Polanski parce qu'il a fui, de l'obliger à rentrer, à plier.

Il me semble que l'affaire aujourd'hui fait plus de mal qu'autre chose, faisant souffrir les deux principaux portagonistes de cette sordide histoire et avec eux toute leur famille. Par ailleurs j'avoue avoir du mal à comprendre l'émotion populaire sur nombre d'interfaces et le fait que tant d'internautes vouent les défenseurs de Polanski aux gémonies. Je crois moi que leur motivations sont respectables et qu'il savoir raison gardée.

Bizarrement cette indignation passionnée me rappelle un peu l'émotion massive et irrationnelle suscitée par la mort de Michael Jackson, autre célébrité épinglée pour des affaires de moeurs, dont la pédophilie au sens étymologique du terme ne fait aucun doûte même s'il n'a pas été condamné pour les crimes de pédophilie qu'on lui a reprochés, mais sur qui tant de personnes ont pleuré naguère.

Personnellement si je peux être radicale quand il s'agit des idées, je préfère la mesure quand il s'agit des hommes, et je pense qu'il vaut mieux être humain avec les gens de leur vivant.

Little women

Yesterday I saw another of the Cannes films that won a prize. It's the British Fish Tank, and again its Prix du Jury is well deserved. That portrait of a teenage girl won't be forgotten.

Mia is a rebellious British teenager whose life isn't a piece of cake. Actually it sucks a lot. You wouldn't want to live in that Essex housing estate that is her fish tank. As for her family, it sucks too, her mother (the wonderful actress that starred in Loach's Its a Free World) wouldn't get a prize in parenting, and her little sister has a filthy mouth(yes the film is filled by bad language from all the female characters but the little sister delivers a very creative coarse language and is hilarious). The three females basically keep insulting each other all the time. Mia doesn't go to school anymore and she doesn't have any friends left. The 15 year old Mia is alone, feeling awful –she hides her body beneath shapeless sportswear just like she hides her softer side–reckless and restless.

The fish tank is the metaphor of the many cages Mia wants to escape. One of the them is her own body, hence her drinking booze (something her mother must have passed on her), her practicing hip-hop dance when nobody watches, and her trying to free a white horse who's chained up by some gypsies in a wasteground. One day a man shows up in the flat and sees her; Connor a hunk whom Mia's mother has brought back. His arrival leads to new possibilies, hope and, perhaps, disappointments.When I read that Mia had a secret passion for dancing and dreamed of becoming a hip-hop dancer, I was afraid that Fish Tank might be some sort of female Billy Eliott, a politicaly correct feel-good movie that would turn into a fairy tale, but it is not. The music has a role to play but Mia's passion isn't the stuff the film is made on. Also even though the film obviously belongs to the "social realism" family like the ones by Ken Loach or Mike Leigh(the plot takes place in a dirty and hopeless neighbourhood), it has its own style. It doesn't shy away from the ugly truth but it doesn't convey a political message, doesn't make a social statement. It's definitely a woman film, not only because the lead character is a 15 year old girl or the director is a woman(Andrea Arnold), but also because it's about the birth of a woman and about female desire.

There's such a sensuality in the way the camera films everything. It makes the audience feels what Mira feels, the breath she tries to catch, the fragrants she inhales, the skin that is touched, whatever Mia smells or tastes.

Michael Fassenber, who plays Connor, is again terrific (that actor never ceases to amaze me) and he's quite perfect as the male object of desire, so nice a guy but oh so disturbing. In the first scene he appears in, you can't help feeling like Mia and staring at that half-naked body. The sexual tension between Mia and Connor is really well done, not in the usual cliched way. Not many films have been made on female desire and even fewer have been made on a teenage girl's sexual awakening (I can think of Splendor in the Grass but Nathalie Wood's character was older, I guess), on the burgeoning female sexuality. Because in this film, even though it's obvious that the attraction and feelings are mutual(Mia and Connor do like each other) to the point of their crossing the line one night(while the pastered mother has passed out), it isn't much about a forbidden love nor about a man falling for his mistress' daughter, it's about Mia becoming a woman, about her leaving the fish tank.

Of course things aren't that simple and Connor isn't the key of her freeing for he isn't as nice as she(we)'d like him to be; he is just a tool in her metamorphosis, of her moving on past her chrysalis state. What I enjoyed in the movie is the lack of over-simplification. We get to see the dirty and the beautiful, the light and the dark side of every character, their strength and weaknesses. Anyway the film always avoids the easy route.So definitely not a fairy tale but not a depressing movie either, there's tenderness still and some sort of moral code remains, even there, even then.